Sully ANDOCHE

Conteur et auteur

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C’est dans le quartier de Saint Jacques à Saint Denis de La Réunion que Sully Andoche a koupé son zonbri1 et passe toute son enfance.
Nous sommes dans les années soixante. La modernité est encore timide et la rue appartient aux enfants. Dans une ambiance bruyante, grouillante même, les cris, les jeux, les disputes sur fond de moukataz1, font partie du quotidien.
Le soir venu, sous le lampadaire de la rue Sainte Marie, on se raconte des histoires. Celles qui font peur sont les préférées. Afin de convaincre son auditoire d’un soir, on rajoute un détail fantastique à l’histoire de la veille qui avait connu un succès pour le moins mitigé. Raconter devient un défi, improviser en racontant, une nécessité quasi vitale si le rakontèr ne veut pas mourir aux yeux des autres.
Il n’a pas connu de conteurs patentés, plutôt présents dans les veillées mortuaires (interdites aux faibles tempéraments d’enfants). Juste le souvenir d’un Grandyab la fès an or raconté en boucle par Pépé Apollon son grand père.
Mais Sully dévore surtout des oreilles et des yeux les zistwar fé pèr de cimetières et d’invisibles. De dévinèr3 aussi ; ceux qui transforment à l’envi les feuilles d’arbre (celui du jacquier donne les meilleurs résultats) en billets craquants de 1000 francs CFA. Je le jure devant la lumière qui m’éclaire et que Dieu m’écrase en poussière si ma langue ramasse des mensonges et comment peux-tu contester une parole de granmoun4 ?
Toute histoire est parole et toute parole est vraie puisque c’est la bouche que Dieu a donnée qui l’a prononcée. Vraie comme l’histoire de cette nuit là où mémé Frédéa a vu son voisin, (homme de loi s’il vous plait !) se transformer en chat pour s’introduire dans la maison de l’autre voisin pour faire des choses que diable seul sait. Comment est-il entré ? Mais par la serrure voyons !
Dans les années 80, Sully donne de la voix avec ses dalon5 du groupe Ziskakan pour que la culture et la langue créoles soient reconnues. Les coupures de courant sont nombreuses et le matériel usagé n’en est pas vraiment la cause. Les censeurs du pas culturellement correct débranchent tout ce qui dépasse. Dans la pénombre, on envoie Sully au devant de la scène pour faire patienter. Tant qu’à faire, il raconte. Plus tard il contera, même quand le courant politique aura changé. Il contera dans les écoles, les kermesses, les kabar6… partout où la parole aura une oreille pour miroir.
Urgence de dire, urgence de rapporter, urgence de transmettre. Le conte, au même titre que le maloya il y a quelques années, mérite qu’on lui restitue la place qui est la sienne dans la culture réunionnaise. En passionné qu’il est, Sully, comme d’autres conteurs, s’y emploie tout modestement.
A moins de se retrouver dans un espace non créolophone, Sully raconte dans sa langue.
S’il se régale à mettre en bouche les contes traditionnels de La Réunion, de l’océan Indien et quelquefois d’ailleurs, il préfère s’amuser à imaginer des histoires, à inventer des légendes toutes aussi vraies les unes que les autres… puisque c’est son imagination qui les a fabriquées.
L’improvisation détient la part majoritaire dans son capital. L’humour en est un actionnaire non négligeable.
Pour lui, il n’y a pas (ou si peu) de contes pour adultes et de contes pour enfants. Il y a des contes que l’on raconte à des adultes et à des enfants. Aussi les thèmes variés de son répertoire se moquent des générations.
Les contes animaliers ont la part belle et parmi eux, les contes d’origine : Comment le crapaud est devenu crapaud ? Pourquoi le cochon est cochon ? …
Ses kriké-kraké accompagnés de jeux de mots et autres digressions, sont des portes par lesquelles le public est invité à entrer pour s’approprier une part de conte.
Depuis 2005, et à l’initiative de Daniel Honoré, il assure avec Anny Grondin, une formation d’initiation à l’art du conte.
Essentiellement en langue créole, il écrit avec Luc Rosello, une dizaine de pièces de théâtre pour Cyclones Production. Victoire Magloire dit Waro et Maskarad, deux pièces co-écrites avec Barbara Robert pour la Konpani Ibao, sont actuellement en programmation.

(1. est né – 2. moqueries – 3. sorcier, devin – 4 : adulte – 5. camarades – 6. concerts)

Sak gramoun té pokor di – Tousa pou di aou : Ala détrwa provèrb èk sirandane kréol (4ème de couverture du dernier ouvrage)
Le dispositif de Sak Gramoun té pokor di a été élaboré, à l’initiative de son auteur, sur le modèle des « cafés suspendus » : un livre acheté = un livre offert (à offrir à son tour !). Et si l’on a bien affaire à un ouvrage de traditions littéraire et culturel, les nouvelles technologies y ont aussi leur place : un QR Code a été inséré dans chaque ouvrage, et renvoie le lecteur à un site Internet où ils auront accès à la version audio des proverbes mis en voix par l’auteur et ses dalons.
Livre à lire, livre à écouter : Sak Gramoun té pokor di est assurément un ouvrage qui saura captiver un large public tant la verve et la gouaille de Sully Andoche gagnent le cœur et l’esprit.

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27/05/2019